mardi 20 février 2007

le Jazz Swing


"April in Paris"
(glenn miller,
Duke Ellington, Benny Goodman,
Count Basie & Woody Herman


Au cours du XXème siècle, le Jazz, musique plurielle, vivante et en constante évolution, a modifié sa forme et s'est enrichi de multiples influences, s'efforçant de ne pas devenir une "institution". Musique de rue qui a cependant exercé sa fascination sur toutes les couches de la population, auprès de toutes les sensibilités culturelles et ethniques.

Différents courants se succèdent, se croisent et cohabitent dans le Jazz. Cette fois j'ai eu envie de présenter le Swing, autrement appelé "Middle Jazz".

"Le Jazz a toujours été associé à quelque chose de peu fréquentable, comme ces types un peu louches dont vous ne voudriez pas comme mari pour votre fille...Le mot "Jazz" est un problème en lui-même, puisqu'il a toujours été associé aux bordels de la Nouvelle Orleans. Dans les années 20, j'ai tenté de convaincre Fletcher Henderson d'appeler le Jazz "musique noire". Mais maintenant, il est trop tard. Cette musique s'est tellement intégrée que vous ne pouvez la dissocoer de telle ou telle manière, ni l'associer à une couleur de peau...(Duke Ellington).



Avant le Swing, ont existé d'autres styles, le Blues, le Jazz New Orleans, les Negro Spirituals, le Gospel, le Ragtime, le Boogie Woogie, le style "Hot" de Chicago avec Louis Armstrong, trompettiste issu de la Nouvelle Orleans, dans les années 20, qui a littéralement ouvert la voie au Jazz moderne, avec l'avènement des Big Bands.

Le terme Swing, qui signifie en anglais "se balancer", ou "balancer", c'est aussi le terme qui exprime la manière d'interpréter le Jazz, joué en faisant "balancer" le rythme. C'est le sens inné du rythme, du Groove, du feeling, de l'improvisation que possède un ensemble de Jazz, et qui donne cette tension typique de cette musique . Ce balancement favorise la danse et se démarque du style "Hot" encore relié au Ragtime.

Sur le plan rythmique, on substitue à toute formule binaire une formule ternaire "balancée" - en anglais "shuffle" - succession de 2 croches qui sera jouée comme une succession de 3 croches en triolet.


Vers 1928-1930 une nouvelle forme de jeu se développe donc lors de l'exode des musiciens de Chicago vers New York, et Kansas City : c'est le Swing. Cependant on dit qu'il serait apparu pour la 1ère fois en 1907 dans une composition de Jerry Roll Morton: "Georgia Swing". C'est donc le style caractéristique du courant du Middle Jazz, Jazz majoritaire dans les années 30, qui s'exprimera à plein dans le cadre des Big Bands. Basés sur le Blues et le Boogie Woogie les orchestres élaborent des thèmes simples et utilisent souvent des phrases musicales courtes de 2 à 4 mesures appelées "Riffs" qui, répétées en contrepoint, font naître le Swing.

New York devient la capitale du Jazz, la 52e Rue étant rebaptisée "Swing Street". De nombreux Clubs ouvrent malgré la prohibition. "Swing Street était une rue très animée, les musiciens passaient d'une boîte à l'autre, d'un Club à l'autre. Le Dimanche après-midi était consacré aux Jam Sessions (rencontres, "boeufs" entre musiciens).



Les années 30 sont cependant celles du Krach de Wall Street (en 1929), et la crise économique qui durera jusqu'en 1934. Beaucoup de musiciens sont au chômage, les maisons de disques font faillite. Seuls certains musiciens seront épargnés (Duke Ellington, par exemple, continue à jouer au Cotton Club). Le Jazz représente un échappatoire pour les Américains, qui ont besoin de s'étourdir et d'oublier leur inquiétudes.

Des musiciens se retrouvent à Kansas City, ville industrielle qui échappe à la crise, où naît le style "Kansas City". Le quartier réservé, protégé par les hommes politiques accueille les musiciens et permet au Jazz de continuer à prospérer. Cependant, à l'entrée en guerre des Etats-Unis, cet élan sera stoppé, puis ce courant sera remplacé par le Be Bop.

L'ère du Swing se caractérise par l'apparition de grands orchestres (les Big Bands): ceux de Duke Ellington, Count Basie ou Benny Goodman sont les plus célèbres. Un Big Band se compose de 15 à 20 musiciens, divisés en sections.
Section rythmique (piano, guitare, contrebasse, batterie) et section mélodique (Cuivres et bois: trompette, trombone, saxophone, clarinette).
L'orchestration se fait plus complexe, les rythmiques et les mélodies s'affinent. Les arrangements sont écrits par un compositeur, et l'improvisation est très structurée. Il y a la partition "conducteur" et les parties séparées. Toutefois des modifications peuvent y être apportées lors des répétitions. Il existe aussi un type d'arrangement ("head" ou "stock" arrangement) sans partition avec juste des indications verbales et chantées que les instrumentistes mémorisent. Une des clés de l'arrangement est le "voicing" (quels instruments l'on choisit pour telle partie et comment ils seront utilisés en fonction de l'effet polyphonique recherché).
Les improvisations s'affranchissent progressivement de la mélodie (Thème) de base du morceau, elles ne sont plus des variations ou paraphrases, mais de vraies inventions qui tiennent compte surtout des accords du piano ou de la guitare, et des notes principales de ces accords (émises par la contrebasse).
Au point de vue rythmique, tous les temps (les 4),sont marqués individuellement, les temps faibles (2 et 4) étant accentués. L'écoute attentive de la contrebasse suffit pour comprendre que tous les temps sont joués distinctement et aussi se rendre compte du principe "Four Beats" (4 temps). Si l'on écoute bien la Batterie, on constate facilement que les 2e et 4e temps sont mis en valeur par la caisse claire. La cymbale "Ride" (douce) marque l'alternance longue-courte (avec des exceptions).



Louis Armstrong & Dizzy Gillespie -
"Umbrella man"

Ces Big Bands favorisent l'apparition de grands solistes, parmi lesquels Art Tatum, Benny Goodman, Billie Holiday, Charlie Christian, Coleman Hawkins, Ella Fitzgerald,Lester Young, Lionel Hampton, et beaucoup d'autres. L'importance donnée au soliste augmente, les "Chorus" en solo deviennent le centre du morceau, soutenus par l'orchestre.

Ainsi on retient la sonorité richement timbrée et très expressive de Coleman Hawkins, donnant un Swing nerveux, des improvisations plutôt lyriques, un discours abondant. Mais de Lester Young une sonorité dense mais peu vibrante, donnant un Swing nonchalant, des improvisations contrastées, avec une certaine réserve dans le jeu. Mais la vague du Swing est d'abord représentée par Benny Goodman: musique au tempo enlevé, pulsation régulière.

"It don't mean a thing if you ain't got that swing"
Le style "Jungle" appartient au Swing: "rythme sèchement battu, lamentations des anches, vociférations grumeleuses des trompettes et des trombones (Cuivres "wa wa" ou "growl", percussion "gong" et "tam tam"), évoquant l'angoissante épaisseur de la forêt et agitant les fantasmes d'une Afrique originelle." Le style fut habilement comparé, dans les années 20, à la "jungle urbaine" de la surpopulation, de la prohibition et de la corruption.
Duke Ellington illustrera magnifiquement ce genre, en 1927 au Cotton Club, auprès d'un public blanc avide de sensations exotiques. Ses meilleures compositions dans ce style sont:
"Black and tan fantasy", "The Mooche", "Echoes of the jungle" et "Koko".
Le style "Mood" (état d'esprit) est apparu dans les années 30. Il désigne des arrangements sophistiqués, une recherche harmonique intense et un goût pour les accompagnements raffinés.
Duke Ellington, en sortant de la Jungle, l'adoptera en écrivant "Mood Indigo".
Enfin le Mainstream, est le courant principal caractérisé par les Jazzmen fidèles à la période du Swing (années 30 à 40), formule de Jazz actuellement la plus répandue (appelée aussi "Middle Jazz"), qui conservent le rythme à 4 temps et le soin apporté par les arrangeurs aux accompagnements des Big bands.

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